Guerre au Rwanda : l'espoir brisé (1991-1994)

Recension rédigée par André Ronde


Dans cet ouvrage, très complet et bien documenté, le général Delort apporte un témoignage particulièrement qualifié sur le drame du Rwanda depuis les débuts du conflit en 1990-91 jusqu’à sa dramatique conclusion lors du « génocide » de 1994.

Particulièrement qualifié, le général Delort l’est par sa connaissance de l’Afrique en général et des interventions françaises sur ce continent et par sa position d’« expert Afrique » auprès du CEMAT (Amiral Lanxade), position qui va l’amener à être engagé directement sur le terrain entre fin 1991 et milieu 1993.

Delors commence dans son ouvrage par bien présenter le contexte du conflit rwandais avec le discours de La Baule du président Mitterrand, et « l’ouverture démocratique » plus ou moins incitée (imposée ?) par la France à un pays profondément marqué par les oppositions ethniques et politiques. Il pose ensuite le cadre de l’intervention française, l’opération NOROIT, suite à la première offensive du FPR en octobre 1990. Ne cherchant pas à masquer le côté politique de ses « Mémoires », le général Delort montre l’importance des relations entre Mitterrand et Habyarimana le président rwandais et la connaissance de ce dossier à Paris grâce à l’action sur place de notre ambassadeur et d’un excellent attaché de défense, colonel de gendarmerie, connaissance qui ne sera pas toujours bien exploitée par les décideurs parisiens.

L’objectif de la France lorsque le colonel Delort est engagé sur place en 1992 est de faire évoluer le régime vers la démocratie et le multipartisme par la diplomatie et la négociation.

Tout au long de l’année 1992 et jusqu’à son départ du Rwanda en mars 1993, Delort constate la difficulté des négociations dans un contexte de méfiance réciproque entre les deux parties et la volonté de FPR de toujours améliorer sa position militaire avant de conclure un accord de paix.

Dans ses rapports de l’époque, Delort alerte sur cette situation et du danger d’une vraie guerre civile et de massacres généralisés en cas du désengagement de la France. Toutefois, il insiste sur le caractère purement défensif du soutien militaire français sans jamais d’engagement direct dans les opérations de l’armée rwandaise, il met en exergue la qualité et la loyauté des officiers français engagés au Rwanda.

En mars 1993, un vrai cessez le feu étant intervenu après les accords d’ARUSHA, suivi d’une résolution de l’ONU, le retrait progressif du dispositif NOROIT est effectué, la France conservant au Rwanda un fort contingent de coopérants.

Rentré en France, ce n’est plus qu’en « observateur » que le général Delort suit la situation au Rwanda d’où la France se dégage de plus en plus ne laissant sur place en décembre 1993 qu’un petit contingent de coopérants.

 Témoin de la dégradation de la situation, de l’inefficacité de l’ONU et du désintérêt des grandes puissances, les États-Unis en particulier, le général Delort ne prend pas vraiment position sur les responsabilités dans l’attentat d’avril 1994 déclencheur du génocide. Il estime qu’à l’époque, la France ne pouvait pas faire plus que l’opération Amaryllis et l’évacuation des ressortissants français et européens avant de s’engager en juin, forte d’un appui international dans l’opération « humanitaire » Turquoise.