Mélanges en l'honneur de Jean Michaud : droit et bioéthique

Recension rédigée par Jean-Louis Baudouin


Jean Michaud a été l’un des premiers juristes français à s’intéresser aux rapports entre le droit et la bioéthique. Ce fut dès la création du Comité national d’éthique au début des années 80. C’est d’ailleurs à cette occasion que j’ai eu le plaisir de faire sa connaissance.

Les Mélanges qui lui sont offertes, coordonnées par Hélène Gaumont-Prat sont un florilège de textes fort variés portant sur certains problèmes philosophiques et éthiques des sciences de la vie et du comportement humain. L’ouvrage comprend 37 contributions et 13 hommages. Il est l’œuvre à la fois de juristes (magistrats, avocats, professeurs) et de scientifiques (médecins, biologistes, chercheurs) et est divisé en trois parties : approches philosophiques, bioéthique et droit et approches européennes et internationales.

Ce regroupement occulte cependant les trois véritables idées transversales de l’ouvrage qui sont les 3 phases de l’existence humaine et qui sont au cœur même de toutes ces réflexions : la création de la vie, la vie et la mort.

S’agissant de la création de la vie, ce sont, entre autres, des textes sur la recherche sur l’embryon (Joseph Jehl), les embryons surnuméraires (Jean-René Binet), le dépistage prénatal (Jean-Pierre Farriaux), les cellules souches (Mario Stasi), la filiation (Georges David), qui illustrent clairement les difficultés du droit et de la bioéthique à intégrer les données scientifiques récentes et à savoir les encadrer. C’est, en réalité le problème de savoir si ce qui est scientifiquement possible reste socialement et éthiquement souhaitable et dans quelles limites.

Dans la seconde de la vie, les études sur le principe de précaution (Béatrice Parance), l’individu et l’humanité (Jean-Pierre Duprat), le don de gamètes (Aude Mirkovic), le prélèvement d’organes (Dominique Thouvenin), la recherche sur le cerveau (Catherine Puigelier) etc. montrent bien comment la normativité juridique est souvent en retard dans sa compréhension et appréhension des réalités scientifiques. Il faut saluer ici l’initiative de la France qui, avec ses lois de bioéthique reste l’un des pionniers en la matière.

Enfin, les articles sur l’annonce d’une maladie grave (Bernard Lobel), les directives anticipées (Brigitte Feuillet), l’euthanasie (Jérôme Bonnard) complètent le cycle et sont, tant en France qu’au Québec, en ce moment d’une brûlante actualité puisqu’au Québec, le gouvernement s’apprête à passer une loi légalisant l’aide à mourir dans la dignité.

À ceci, il convient d’ajouter d’autres textes plus généraux sur, par exemple, l’indépendance de la justice (Marie-Odile Bertella-Geffroy, l’interprétation de la règle de droit (Philippe Pedrot), l’esprit des lois de bioéthique (François Terré) etc.

La lecture de cet ouvrage est un « must » pour ceux et celles qui s’interrogent sur les rapports entre le droit et la bioéthique et sur l’impact social des progrès scientifiques sur une humanité en devenir.

Par sa grande qualité, ce livre est un bel hommage au juriste et au grand humaniste qu’est Jean Michaud.