L'intendance de La Rochelle à la fin du XVIIe siècle. Edition critique ...

Recension rédigée par Josette Rivallain


Dans cet ouvrage, Pascal Even a fait appel à ses savoirs d’archiviste pour décrire l’intendant Michel Bégon et ses différentes fonctions au cours de la seconde moitié du XVIIe siècle, particulièrement dans la toute récente généralité de La Rochelle, se référant aux différentes versions connues du Mémoire rédigé par Michel Bégon en 1698.

La présentation est établie en quatre parties : introduction, manuscrit, Mémoire sur la généralité de La Rochelle, état des paroisses de cette généralité. L’ensemble est accompagné d’une liste des abréviations utilisées, d’une abondante bibliographie, classée en trois rubriques, d’un index répertoriant les noms de lieux et de famille et d’une table des illustrations.

La première partie présente l’homme que fut Michel Bégon, l’état des provinces de l’Aunis et de la Saintonge, des ports de Rochefort et de La Rochelle à la fin du XVIIe siècle.

En deuxième partie, est évoquée l’histoire du manuscrit et des archives publiques, consultées principalement dans la région parisienne, en Aunis et Saintonge, et privées. Long de près de vingt pages, le mémoire décrit l’étendue de la généralité de La Rochelle établie en 1694, passe en revue les différentes élections qui la constituent, l’étendue des juridictions des différents évêchés qui peuvent chevaucher les territoires des élections, ainsi que le gouvernement militaire doté lui aussi d’autres limites, soulignant de façon détaillée les attributions précises de chaque responsable, les désignant par leur titre. S’appuyant sur les documents de l’imposition de l’année 1688, il suit la liste des paroisses, accompagnée du nom des seigneurs, de la qualité du terroir. Il énumère les cours d’eau ainsi que leur qualité, la gamme des richesses naturelles potentielles, l’état du commerce maritime, en grande partie tourné vers le nord de l’Europe. Y est également dressée la liste des villes et leurs avantages respectifs.

Au fil de l’énoncé des taxes, des ordres royaux, des juridictions et de la qualité des juges, des ecclésiastiques, des moines, c’est toute la vie des habitants qui s’anime, d’autant que la vie religieuse reste marquée par les conflits des guerres de religion.

A travers les documents d’archives consultés, il apparait que Michel Bégon s’est largement appuyé sur les rapports rédigés et remis par les différents intendants, même s’il reste l’auteur de la présentation du rapport de synthèse.

Dans le cadre de l’étude de l’histoire maritime, et de celle des outre-mers, ce travail d’érudition nous situe avec précision l’état du commerce maritime au loin, à la fin du XVIIe siècle, assuré par le port de La Rochelle, dresse un précieuse liste des produits provenant de l’arrière-pays, de Suède et du Danemark (sel, vin, papier, serge, toile) ainsi que ceux arrivant des terres lointaines de l’Amérique, notamment du Canada, de Nouvelle France et des Antilles en plein essor depuis 1660. Du nord, les Terres-Neuvas ramenaient de la morue, du Golfe du Mexique, c’était du tabac, puis de plus en plus du sucre, alors que se développait le commerce de traite, mais aussi l’indigo, le cacao, le rocou, les cuirs, le coton, les citrons. De Saint Domingue arrivait cochenille, quinquina, cacao, vanille, perles, émeraude, piastres en lien avec la flibusterie. A partir de 1660/1665, une part de ces produits fut exportée vers la Hollande et l’Angleterre.

Créé en 1665/1666, le port de Rochefort développa son arsenal, assura la maintenance des navires, des départs vers le Canada, la Nouvelle France, les Antilles, celui de La Rochelle, en pleine reconstruction, assura plus particulièrement l’embarquement des missionnaires, des soldats, des administrateurs en vue de la mise en valeur des terres américaines.

Ici, l’ensemble des documents présentés dressent un tableau détaillé de la vie politique, juridique et surtout commerciale de l‘Aunis et de la Saintonge à la fin du XVIIe siècle, replaçant dans ses contextes l’histoire tumultueuse de la vie de cette région au lendemain de la Fronde et la création d’une nouvelle généralité à La Rochelle.

Dans son mémoire, Michel Bégon, à travers ses responsabilités, rend vivante la réalité de la vie de la généralité de La Rochelle, avec ses optiques, ses besoins liés aux commerces. L’auteur du mémoire fut également un homme sensible à la pauvreté qui l’entourait.

L’ouvrage de Pascal Even concourt à mieux faire connaître les conditions dans lesquelles se sont organisés les échanges avec l’outre-mer américain.