Dans la classe de l'homme blanc : l'enseignement du fait colonial en France des années 1980 à nos jours

Recension rédigée par Jean Nemo


On aura deviné à la lecture du titre que seules les plus ou moins trente dernières années sont couvertes par cette analyse, celles où justement dans bien des villes ou plutôt des banlieues la classe n’était plus seulement celle de « l’homme blanc » de la première moitié du 20ème siècle.

On aura aussi en mémoire qu’au cours de ces trente ans, bien des attitudes ou plutôt des controverses se seront développées à propos du fait colonial et de la décolonisation.

Ce que l’on n’aura pas forcément deviné avant de se promener sur la Toile, c’est que l’ouvrage sous revue et son auteure auront donné lieu à bien des critiques : l’auteure ne serait pas une « historienne », même pas une « essayiste », en d’autres termes elle n’aurait pas vocation à écrire de ou à propos de l’histoire de France telle qu’on l’enseigne dans « la classe de l’homme blanc ».

Son positionnement plutôt « à gauche », quoique parfois ambigu, l’aurait amenée à prendre des positions jugées trop engagées pour un pur « historien », à propos par exemple des « origines gauloises de la France », qui serait notamment une vision proposée par Nicolas Sarkozy en plusieurs circonstances.

Pourtant Laurence de Cock est à l’origine agrégée d’histoire-géographie, ce qui lui assure dans ces deux disciplines une bonne formation de base. A priori, cela lui donne une certaine légitimité à porter un jugement sur la façon dont on les enseigne dans « la classe de l’homme blanc », hier et plus récemment. Que ses engagements personnels donnent lieu à critiques ou controverses, cela entre dans la vie normale du débat public, du moins dans une société qui, comme la nôtre, s’affirme pluraliste. La controverse n’y est pas étrangère, l’invective sort du débat.

Revenons, après cette incursion désagréable sur la Toile, à l’ouvrage lui-même. Celui-ci décline presqu’année par année les différentes étapes de l’histoire telle qu’enseignée dans « la classe de l’homme blanc ». Dix chapitres couvrent à la fois des questions de méthode et d’approches (« le fait colonial comme question vive », « l’altérité culturelle dans la crise de l’enseignement de l’histoire des années 1980 »), la mémoire de la guerre d’Algérie et son enseignement, l’exacerbation d’une approche erronée, celle des liens supposés entre « passé colonial et immigration », « l’échec final d’un nouveau récit scolaire postcolonial ».

Le corps de l’ouvrage est constitué par de nombreux témoignages ou références à des sommités, telles Benjamin Stora, ou de nombreuses institutions, tels les « rappels à l’ordre » par exemple de l’ECRI (Commission européenne contre le racisme et l’intolérance).

Comme il est souvent le cas dans ce type d’ouvrages, celui-ci ne peut se lire qu’un carnet de note et des post-it à la main. Son appareil critique est abondant et de bonne qualité. Sur le fond, il est convaincant, même s’il prête ici ou là à discussion.