Les grandes figures de l'Iran

Auteur Yves Bomati, Houchang Nahavandi
Editeur Perrin
Date 2015
Pages 392
Sujets Iran Histoire Iran Histoire Biographies
Cote 60.531
Recension rédigée par Bernard Dupaigne


Cet épais ouvrage se propose de présenter une histoire de l’Iran au travers de l’évocation, sur trois mille ans, de treize personnalités emblématiques – artistes, médecins, politiques, religieux, savants – pour mieux faire comprendre cette nation, « d’une culture et d’une civilisation parmi les plus anciennes du monde ». L’histoire de l’Iran est compliquée, mouvementée, faite de complots, d’invasions, de conquêtes, de massacres, de destructions et d’assassinats.

Elle est ici parfaitement déroulée ici, avec ses temps forts et ses faiblesses, avec tous ces personnages, certains partout très connus, d’autres moins : Zarathoustra le réformateur, qui reçoit, au cours de sept entretiens, les révélations d’Ahura Mazda, le dieu suprême, ordonnateur du monde, Cyrus (vers 559-530 av. J.-C.) et l’empire achéménide, Darius (vers 551-486 av. J.-C.) et les luttes contre les Grecs, Mithridate Ier l’Arsacide (171-135 av. J.-C.), Chapour Ier (200-272 ap. J.-C.) fondateur de l’empire sassanide et vainqueur des armées romaines, en opposition pour le contrôle de l’Arménie et de la Palestine, l’arrivée des tribus arabes, qui se saisissent finalement facilement (635-643) d’une Perse épuisée par ses luttes contre Rome et Byzance. Ferdowsi (930-1020), le poète universellement connu, se fera le chantre de la Perse millénaire contre le récent califat des tribus arabes. Avicenne (980-1037), à la fois médecin et philosophe qui récite par cœur le Coran dès l’âge de dix ans.

            Ismaïl Ier (1487-1524) doit relever le pays après les massacres commis par les cavaliers de Genghis Khan, et les troupes de Tamerlan (« Timour le Boiteux »). Shah Abbas (1571-1629) reprend la tradition des grands rois bâtisseurs : Isfahan la belle est sa capitale. Il reconstitue l’empire perse. Ses successeurs seront battus par les Afghans de Kandahar. Et Nader Shah (1688-1742), un Afshar, c’est-à-dire un Turc, se saisit du pouvoir perse, avant de conquérir les royaumes des Grands Moghols des Indes.

            C’est un Qadjar, une tribu apparentée aux Turkmènes, donc de langue turque, Mohammed Qadjar (1742-1797), qui fondera la prochaine dynastie, celle des Qadjars, après maintes péripéties et retournements de situation, et qui finira assassiné, ivre de massacres et de cruautés, ce qui sera suivi de cinquante ans de déclin.

            Amir Kabir (vers 1803-1852), d’origine modeste, devient grand chancelier, après avoir permis à Naser-ed din d’accéder au pouvoir. Il tente de moderniser l’armée et l’administration (1848-1851), et, ce faisant, il se fait des ennemis des mollahs, qui voient leurs prérogatives réduites, ainsi que des Russes et des Britanniques, qui souhaitent que la Perse reste faible. Il est exilé à Kachan, puis forcé au suicide. Le successeur de Naser-ed din, Mozafar-ol din, promulgue en 1606, une constitution libérale, fondant ainsi une monarchie constitutionnelle, vite renversée par son successeur. En 1919, les Britanniques tentent d’imposer un protectorat, pour se protéger des visées du nouveau pouvoir bolchevique. Ils imposent Sayed Zia, épaulé par le général Réza Khan, commandant de la Division cosaque, garde de la famille royale.

            Lequel Réza (1878-1944) prendra le pouvoir six ans plus tard, sous le nom de Réza Shah Pahlavi, à la tête d’une république laïque et démocratique. Le nouveau Parlement proclame la déchéance des rois qadjars, et nomme en 1925 Réza Pahlavi empereur, shah-in-shah, qui lancera très vite de grandes réformes dans tous les domaines, de l’armée, de l’administration, de l’économie, des arts. Le français est promu au rang de langue étrangère obligatoire au niveau du secondaire. Après un voyage en Turquie en 1934, où il est reçu fastueusement par Atatürk, Réza Chah interdit le port du voile pour les femmes.

            En 1939, il se tourne plutôt vers l’Allemagne, l’Urss et le Japon, à la grande fureur des Britanniques avec qui il a des différents à propos de la répartition des revenus du pétrole. Conjointement, les armées britanniques et soviétiques pénètrent en Iran en août 1941. Le roi Réza doit abdiquer au bout de vingt-deux jours, laissant le trône à son fils Mohammed Réza, âgé alors de vingt ans. Il règnera trente-sept ans. Pour lui aussi, l’impulsion moderniste et réformatrice qu’il voulait imposer à son peuple va susciter l’ire des mollahs, qui provoquèrent sa chute pour imposer un État clérical.

            Toute l’histoire de l’Iran est ainsi déroulée, au cours de récits passionnants, bien relatés et faciles à lire. Finalement, l’Iran, encerclé par les terres du Tsar et l’empire britannique, a mieux su que l’Afghanistan, dans la même situation, retrouver son indépendance. Le pays, quoiqu’on puisse en penser, fonctionne presque seul. L’Iran a une idéologie, l’Afghanistan n’a plus celle que de l’argent.

            « Rares sont les nations, les pays qui, dans l’histoire, ont pu conserver leur identité et leur unité originelles sur quelque quarante siècles », concluent les deux auteurs.