Lettres du Congo (1892-1893)

Recension rédigée par Jean Nemo


Ces deux tomes devraient intéresser nos consœurs et confrères à plus d’un titre. Outre la famille d’Uzès qui remonte fort loin dans l’histoire de la noblesse française, de même que ses habitats successifs, ces tomes ont été présentés par notre confrère Yves Boulvert et quelques membres de sa famille.

D’autre part, ce jeune aristocrate fortuné a été l’un des premiers Européens de l’époque juste précoloniale, à parcourir après Conacri et Cotonou, les chemins ou les pistes, du Congo à l’Oubangui. On saura donc gré à l’éditeur et à Yves Boulvert de rendre ces lettres (ou certaines d’entre elles) à nouveau accessibles. Car, sauf de la part de spécialistes de l’histoire pré et coloniale, la plupart des lecteurs, fussent-ils érudits, liront avec grand intérêt ces « Lettres ».

Elles traitent du rôle des individus nombreux, parfois impécunieux, le plus souvent fortunés, qui préparèrent les étapes de la proche colonisation.

Dans son introduction, Yves Boulvert rappelle tout d’abord que ce duc d’Uzès périt à 23 ans, à Cabinda au moment de se réembarquer pour l’Europe, victime comme certains de ses compagnons de problèmes de santé. Plus généralement, cet aristocrate relate dans ses « Lettres » son découragement qui crée « un hiatus tellement infranchissable que les lettres paisibles au début, et mêmes sereines et confiantes, s’alourdissent peu à peu du poids du découragement ». Car comment comprendre les anthropophages, les Banziris ou les Yakomas lorsque l’on sort d’une aristocratie européenne, pour qui l’Afrique à la veille de la conquête coloniale reste le dernier continent rempli de blancs cartographiques.  

Comme Yves Boulvert le conclut dans son introduction, c’est aussi « l’histoire d’un fils de la plus vieille France que l’adversité révéla à lui-même et aux autres. Ses lettres sont des leçons de courage, patience, humour, ténacité, initiative, sous un climat destructeur de toute volonté ».

En outre, Jacques d’Uzès eut maille à partir avec les Belges (la course vers le nord de l’Afrique qui aboutit à la fondation de Bangui).

Les écrits et les lettres de Jacques d’Uzès ne figurent dans la biblio BNF qu’au titre de ces deux tomes sous revue.

Comme il était dit dans les premières lignes de cette note de lecture, le lecteur « éclairé » ne perdra pas son temps à se plonger dans cette lecture, d’autant plus que les illustrations sont de bonne qualité. Car l’itinéraire de Jacques d’Uzès passe aussi par « Conacri », Cotonou.