Minorités en Méditerranée au XIXe siècle : identités, identifications, circulations

Recension rédigée par Jean Nemo


Quatorze auteurs ont contribué à cet ouvrage collectif. Comme il est de coutume, c’est dans l’introduction et dans la conclusion que l’on trouvera son fil conducteur. Le titre lui-même est cependant clair, dans la mesure où il parle encore aujourd’hui au lecteur non averti. En d’autres termes, le lecteur doit comprendre que des questions qui restent d’actualité ont connu des précédents dans le passé récent. Ya-il des relations entre l’actualité et ce récent passé ?

 Trois parties : produire la minorité pour gouverner ; entre communauté, nation et religion, le statut des minorités au prisme des rivalités impériales ; les minorités face aux reconfigurations politiques, transferts et circulation des normes et des pratiques étatiques.

Les « remerciements » qui ouvrent l’ouvrage font référence à un colloque de 2016. Il y est explicitement dit que qu’il en constitue les actes. Les trois directeurs sont respectivement spécialistes de l’histoire des Juifs en France et au Maghreb (V. Aslan), historien spécialiste des chrétiens dans l’empire ottoman (B. Heyberger), spécialiste de la nation et du nationalisme en France et en Europe (J. Vogel).

Comme il est dit en fin de 4ème de couverture, « …ce livre collectif entend contribuer à une histoire croisée des minorités, en faisant les historiographies de l’aire ottomane, des mondes coloniaux et de l’Europe ».

L’ouvrage sous revue se lira aisément par le lecteur intéressé en raison des résumés qui figurent in fine, (P. 263 à 271), de la rapide présentation des auteurs, de disciplines diverses (avant tout historiens, mais aussi arabisants, sociologues…).

Dans leur introduction, deux des directeurs (V. Aslan et B. J. Vogel) précisent que « la notion moderne de minorités a été présentée dans l’historiographie comme le résultat des débats des experts internationaux, après la Grande Guerre, concernant la dissolution des empires austro-hongrois et ottoman… ». La conférence de la paix de Paris (1919) et le traité de Lausanne (1923) ont été considérés comme des moments-clés de la notion de minorité. C’était négliger des formes antérieures. D’où l’utilité, voire l’obligation, de mieux comprendre les notions antérieures, objets de moins d’études. « Bien que le pourtour méditerranéen ait été généralement comme une marge de l’histoire de l’Europe, les textes de ce livre démontrent l’intérêt pleinement dans une histoire européenne élargie », dernière phrase de l’introduction.

Dans sa conclusion, B. Heyberger plaide pour la poursuite de l’étude des minorités non seulement pour la période contemporaine mais aussi, pour le passé, « contextualisée ». « Les missionnaires latins ont pu s’établir et se maintenir dans l’empire ottoman grâce à la protection de la diplomatie française, mais aussi grâce à leur « amitié » avec des notables ou des officiers musulmans et leurs recours aux gouverneurs et aux cadis ». Telle est la dernière phrase de la conclusion.

Cet appel à l’approfondissement des réalités de la notion de minorité à travers les époques, les lieux et leurs contextes ne peut se discuter. Il n’est pas sûr que le lecteur d’aujourd’hui, pour peu qu’il se soit intéressé à ces questions, ait appris grand-chose à la lecture de cet ouvrage. Á recommander cependant au lecteur plus généraliste.

Comme il est d’usage dans un ouvrage tel que celui-ci, l’appareil critique est de bonne qualité (résumés des chapitres, bibliographie accompagnant ces chapitres et in fine).