Catastrophes et environnement : Haïti, séisme du 12 Janvier 2010 ...

Recension rédigée par Gérard Mottet


 Cet ouvrage collectif est consacré au très meurtrier séisme qui, le 12 Janvier 2010, ravagea la capitale haïtienne de Port-au-Prince et ses périphéries, et causa la mort d’environ 300.000 personnes.

Dans l’introduction, le coordinateur de ce livre, Laënnec Hurbon, insiste sur le rôle des sciences sociales, qu’il convient de mieux prendre en compte dans les décisions politiques et institutionnelles qui suivent les catastrophes naturelles.

Les contributeurs et contributrices de ce travail s’expriment donc en fonction de leurs disciplines initiales : anthropologie, sociologie, histoire, philosophie, géographie humaine et régionale.

Les titres de chacun des auteurs sont, de ce fait, très éloquents : « Invisibles omniprésents. Les morts du séisme » (Alice Corbert, pp. 29-58), « Terre, liberté. Pour une nouvelle politique de la catastrophe » (Edelyn Dorismond, pp. 59-104), « Port-au-Prince en sept lieux » (Jean-Marie Théodat, pp 105-149), « Vulnérabilité : pour une sociologie du risque en Haïti et en République dominicaine » (Rachelle Charlier-Doucet, pp. 150-191), « Les défis de la reconstruction » (Alain Gilles, pp. 193-218), « L’Etat haïtien face à la catastrophe du 12 Janvier 2010 » (Laënnec Hurbon, pp. 219-241).

Chacun de ces articles est suivi d’une riche bibliographie, puis, dans la rubrique
« Annexes », d’une histoire des tremblements de terre, notamment de ceux de 1751 et de 1770.

Lewis Ampidu Clorméus termine ensuite l’ouvrage par une « Brève bibliographie sur les séismes en Haïti » (pp. 255-266), en s’appuyant sur la documentation historique, philosophique et scientifique.

Cette approche pluridisciplinaire avait donc toute sa place dans une des éditions de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales.

Au cœur de l’ouvrage, le géographe Jean-Marie Théodat sait très bien expliquer la concentration dramatique de la population urbaine, les rapports villes-campagnes de cette capitale surpeuplée devenue au moment du séisme du 12 Janvier 2010, une agglomération à l’urbanisation incontrôlée de plus de trois millions d’habitants.

L’ensemble de ce livre dénonce avec force l’incapacité des gouvernements successifs à évaluer la grande dangerosité de ce site urbain.

Il se dégage donc de cet ouvrage collectif une réelle affirmation que les autorités politiques de ce pays n’ont pas daigné prendre en compte les études scientifiques et sociétales initialement réalisées.

Le drame qui a frappé Port-au-Prince doit être, en plus, replacé maintenant dans un contexte morpho-structural multi-scalaire.

Cette capitale est en effet située, certes au fond d’une baie protectrice, mais aussi sur une longue faille rectiligne à décrochement sénestre.

Le tout dans l’affrontement des plaques tectoniques du très sensible carrefour caraïbe resserré entre l’arc volcano-tectonique des Petites Antilles à l’Est, et à l’Ouest, le plan de subduction active de la façade Pacifique de l’Amérique centrale isthmique.

Il est donc temps, ici comme dans le monde entier, de donner un autre sens à l’interface homme, nature et sociétés, et de ne pas séparer les décisions politiques en aménagement des territoires, des géosciences et de l’ensemble des sciences de la Terre.