Dieux de l'Inde : images et signes

Recension rédigée par Françoise Mallison


Dieux de l’Inde est un ouvrage étonnant, singulier. On est d’abord charmé, quand on l’aborde, par ses magnifiques photos aux couleurs superbes, mais c’est loin d’être un livre de table de salon car lorsqu’on quitte les images pour le texte on découvre une œuvre d’une rigoureuse érudition avec ses références, une bibliographie abondante, index, tableaux, carte et, quoiqu’en dise modestement l’auteur, c’est beaucoup plus qu’un guide dans le dédale du panthéon indien pour touristes cultivés. Son empathie pour l’Inde est évidente et son souci de faire se joindre l’iconographie de l’Inde classique aux chromos contemporains est une entreprise audacieuse, car – comme pour la littérature – l’antiquité est un noble sujet, et les productions populaires sont plus ou moins méprisées. Il y a là une piste très intéressante. On peut dire aussi que, d’une certaine façon, les références et la documentation sont anciennes et témoignent des études iconographiques indiennes françaises des années 1960-1980. Mais l’auteur  a pris soin d’actualiser ses sources, cependant un charme discret de l’Inde Pondichérienne est perceptible.

 L’ouvrage propose une organisation rationnelle, chronologique de la multitude des images, sculptures et chromos  représentant les dieux et les héros. La première partie présente les Sources de l’hindouisme  depuis le Védisme, sans image, jusqu’aux chromos de la fin du XIXe siècle, en détaillant la progression architecturale des sanctuaires sculptés depuis les premiers siècles du premier millénaire jusqu’à la moitié du second, lorsque la créativité se fossilise. Cette partie traite aussi de la construction artificielle de la Trimurti, trinité hindoue : Brahma, Shiva et Vishnu, pour finir par évoquer Brahma plus brièvement et laisser la place aux deux autres dieux majeurs Shiva et Vishnu faisant l’un et l’autre l’objet de la seconde et troisième partie. D’abord vient Shiva aux multiples attributs, sa « famille » et ses formes diverses. La troisième partie est dévolue à Vishnu, « Vishnu et les héros ». Y sont traités les dix avatars, la légende de Krishna, les épopées du Mahabharata et du Ramayana. Une quatrième partie plus courte mais bienvenue traite de la grande Déesse, de ses formes populaires, et des déesses fluviales. La cinquième et dernière partie décrit les représentations des « demi-dieux » et êtres célestes.

L’ouvrage est très riche mais est la résultante de choix, inévitablement, car il faudrait obtenir beaucoup de renaissances pour venir à bout du légendaire comput de 33 « crores » (voir page 24, note 25), c’est-à-dire de 330 millions de dieux. Dans cette perspective c’est un excellent début.