Survivance des sites monastiques paléochrétiens dans le Proche-Orient

Recension rédigée par Claude Briand-Ponsart


Au Proche-Orient, le phénomène monastique, traditionnellement rattaché à ses fondateurs égyptiens, Antoine et Pachôme, connut un vif succès dès le IVe siècle. Il s’est naturellement accompagné de la fondation d’un grand nombre de monastères dans les patriarcats d’Alexandrie et de Jérusalem. Parmi tous ceux qui se sont implantés, certains ont disparu, mais sont connus par des textes, tel celui de Mélanie la Jeune en Palestine. D’autres ont laissé des traces archéologiques ; parfois les deux sources se complètent. C’est à un bilan des connaissances surtout archéologiques de ces monastères que nous convie l’auteur à travers l’exposé de la documentation subsistante.

Les installations se répartissent en trois formes principales : les laures, les colonies ascétiques et les monastères aux constructions regroupées autour d’une cour. Dans un premier temps, les anachorètes aménagèrent des abris dans des tombes, par exemple dans les nécropoles thébaines, dans des carrières ou d’anciennes grottes, notamment dans le désert de Judée. Ils édifièrent plus rarement de petites bâtisses. Des sentiers reliant les cellules et un groupe de bâtiments collectifs, dont un lieu de prière, semblent avoir donné à la laure ses traits principaux, tandis que des tours indiquaient les limites de l’appropriation du site par les moines. L’apparition de ces divers éléments s’échelonnait sur un temps plus ou moins long. Ainsi, en Judée, la Grande Laure de Sabas en fut pourvue tardivement, celle d’Euthyme le fut plus rapidement. Si des laures restèrent modestes, d’autres connurent un ample développement, la plupart d’entre elles grâce au culte d’un saint, parfois leur fondateur, ou à la protection du pouvoir.

 Les traces archéologiques montrent qu’une colonie monastique pouvait abriter temporairement des laures. C’est ce qu’on observe dans la région thébaine et dans les trois grands sites de Basse Egypte implantés sur un axe parallèle à la branche occidentale du Nil au sud d’Alexandrie, que furent Nitrie, fondé entre 320 et 330, mais qui a totalement disparu, les Kellia (Cellules), extension de Nitrie, dont subsistent d’importants vestiges, et Scété, encore en usage. Site immense, les Kellia, qui étaient réparties en sept agglomérations s’étendant sur plus de vingt kilomètres, comptaient au moins mille cinq cents cellules, dont certaines ont fait l’objet de fouilles exhaustives. À la fin du IVe siècle, la description que Pallade donne de Nitrie permet de comprendre le fonctionnement de ces monastères. Les moines y vivaient de façon autonome, « chacun comme il veut et comme il peut », sous une autorité commune représentée par un synode d’anciens. Ce mode de vie semi-anachorétique se poursuivit  au IVe siècle, mais une autre forme de monachisme apparut en Haute-Égypte, avec Pachôme. Retiré dans un village désert, il fut rejoint par des disciples de plus en plus nombreux. Une dizaine de communautés sont recensées à la fin du IVe s. Les textes s’accordent pour le décrire comme le fondateur du cénobitisme. Divers témoignages, dont celui de Jérôme, évoquent sa règleet les programmes architecturaux mis en œuvre. Mais, si le vocabulaire est bien identifié, la discussion reste ouverte quant à la pratique de cette vie communautaire, d’autant plus qu’aucun monastère n’a été trouvé. Cette disparition s’expliquerait par une double conjonction : leur implantation près de villages qui auraient progressivement recouvert les bâtiments et leur opposition aux résolutions du concile de Chalcédoine (en 451), qui les aurait privés de soutiens. L’auteur étudie ensuite le monastère de Jérémie à Saqqarah. Lié au règne d’Anastase (491-518), il connut plusieurs développements architecturaux et rappelle par certains traits les monastères pachômiens. Il subsista plusieurs siècles et se signala par la richesse de ses éléments architecturaux, signes d’une protection impériale, dont celle de Justinien.

Autre région étudiée, la Palestine, où les monastères du désert de Judée bénéficièrent de la présence des Lieux Saints. Après Chariton qui s’installa à Pharan et créa trois autres laures, Euthyme en fonda une vers 411, qui s’accompagna d’un monastère où l’on menait une vie commune. Le succès rencontré conduisit son successeur à agrandir le monastère. Sur le modèle d’Euthyme, Sabas, après de longues années dans le désert, accepta des disciples et fonda à son tour une laure et des monastères. A l’inverse des Pachômiens, Euthyme et Sabas soutinrent les décisions du concile de Chalcédoine. Après ce tour d’horizon des monastères égyptiens et palestiniens, l’ouvrage se clôt par une bibliographie détaillée et une trentaine de plans des sites étudiés.

 



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