La nationalité française dans l'océan Indien : actes du colloque organisé à Saint-Denis de La Réunion, 9 novembre 2015

Recension rédigée par Jean Nemo


 Il est aujourd’hui sans doute un peu tardif de rendre compte d’actes d’un colloque tenu depuis plus de quatre ans et d’un ouvrage édité depuis presque deux ans. L’on verra à la fin de cette note de lecture si ledit colloque a tracé un sillon toujours légitime.

La bibliographie des deux directeurs est relativement courte. La première a enseigné et enseigne encore à la Réunion, après avoir acquis ses titres universitaires à Panthéon-Assas, elle est juriste spécialisée dans le droit privé mais par ailleurs active dans un certain nombre de centres locaux de recherche. Le second, après avoir enseigné à la Réunion est professeur de droit privé à Saint-Étienne.

Outre les allocutions d’ouverture, une petite quinzaine d’intervenants, dont George Pau-Langevin (alors ministre des Outre-mer), se sont exprimés sur divers sujets, rassemblés dans ces « Actes » en trois parties, lesquelles sont accompagnées de tables rondes : Nationalités et territoires ; nationalité et citoyenneté ; nationalité et identité.

Ces « Actes » sont conclus par les deux codirecteurs, synthèse ci-après résumée.

Elle rappelle tout d’abord que l’océan Indien constitue un cas très particulier : la Réunion, Mayotte et les instances ou organisations multilatérales régionales posent des questions juridiques et pratiques à l’expression et à la reconnaissance de la nationalité française.

Puis elles reprennent les conclusions tirées pour chacune des trois parties du colloque.

Dans l’océan Indien, le droit de la nationalité « reste très marqué par l’histoire des colonies, anciennement sous souveraineté française. Le droit du sol n’y a pourtant pas joué la même fonction que dans l’hexagone… ». Aujourd’hui, les différents partenaires régionaux (Inde, Comores, Madagascar) ayant leurs propres règles, ce droit du sol pose souvent des difficultés d’interprétation, entre « jus soli, ethnocentrisme et considérations économiques ».

Les idées de nationalité, de citoyenneté, d’identité sont-elles ici de même nature ? Certains intervenants en ont douté, notamment en ce qui concerne la « citoyenneté européenne », chaque État restant souverain dans la détermination de la nationalité de ses citoyens. Suivent une série de définitions, présentées par les intervenants, de l’état civil, « Se sentir français et être Français sont une chose : le prouver en est une autre ». Une bonne soixantaine d’affaires sont évoquées chaque année au tribunal d’instance pour des personnes nées à Madagascar, qui veulent se voir reconnaître une nationalité mal établie par des actes d’état-civil « entachés d’irrégularité ».

À ce propos, s’il est permis au rédacteur de la présente note de lecture d’intervenir dans ce colloque avec retard, il aurait fait état de difficultés vécues : l’un de ses enfants étant né à Tananarive et voulant se marier quelques vingt-deux ou vingt-trois années plus tard dans un autre pays africain anglophone eut la mauvaise surprise d’entendre le consul français lui demander de prouver sa nationalité française. On passera sans insister sur les péripéties ubuesques qu’il fallut surmonter pour faire admettre au dit consul que cette nationalité était effective, le jeune intéressé ayant notamment fait son « service militaire en « coopération ».

On notera pour terminer cette recension inhabituelle que le colloque n’ayant apparemment duré que vingt-quatre heures s’est avéré fort complet sur les problématiques de « La nationalité française dans l’océan Indien ». On doit supposer, c’est un point fort positif, qu’il avait été soigneusement préparé par les organisateurs et les intervenants.

Le « sillon » évoqué ci-dessus a été bien tracé et permet au lecteur intéressé par les problématiques des définitions et des modalités de la nationalité française d’en découvrir des aspects intéressants hors de l’hexagone.