Vers le musée africain du XXIe siècle : ouverture et coopération

Recension rédigée par Jean Nemo


Comme le dit l’une des pages de garde, « Cet ouvrage a été publié dans le cadre des Journées d’étude Musées français et patrimoine extra-européen qui se sont tenues au Muséum d’Histoire naturelle du Havre le 23 et 24 novembre 2017 ».

Compte tenu d’orientations au niveau multilatéral, notamment de l’UNESCO, et de récentes déclarations au plus haut niveau français (plusieurs déclarations du Président Macron en Afrique et plus spécifiquement à Ouagadougou), plusieurs questions sont posées : existe-t-il des musées africains « fiables » en termes de conservation, d’exposition ? Beaucoup d’objets d’art africain sont-ils légitimement exposés ou stockés dans des musées extra-européens ? Existe-t-il un droit ou une jurisprudence justifiant le maintien de ces objets dans des musées extra-européens ou leur retour dans leurs pays d’origine ?

Tout à fait hors sujet : les nombreuses péripéties qui ont abouti à l’exposition en bonne place de la Vénus de Milo, depuis sa découverte par un paysan de l’île, son difficile marchandage, sont bien connues. De même pour la Victoire de Samothrace. Le musée du Louvre expose également de très nombreux diptyques et autres triptyques religieux médiévaux, provenant de toutes les régions d’Europe. Beaucoup furent acquis – ou pillés – lors des nombreuses incursions françaises en Italie, depuis François Ier jusqu’à Bonaparte. Se pose-t-on aujourd’hui la question de principe de la légitimité de leur retour au pays d’origine ou aux entités politiques qui leur ont succédé ?

Revenons au sujet. La préface de l’ouvrage sous revue déclare notamment : « La connaissance et la coopération mutuelle sont une nouvelle étape de l’histoire commune entre Européens et Africains ». Il ne s’agit donc pas ici de relayer ce grand débat du retour définitif ou provisoire des œuvres d’art africain. Mais plus modestement, comme l’indique la table des matières, des modalités d’ouverture, de coopération et d’appui.

La quinzaine de contributeurs est constituée de responsables locaux (muséum du Havre) ou nationaux (ministère de la Culture) à des spécialistes dans tel ou tel domaine (par exemple l’iconographie à partir de cartes postales anciennes, ou le partage et la coopération autour du fossile de Toumaï), soit un éventail de compétences bien diversifié.

En trois grandes parties, « Coopérer », « S’ouvrir », « Nouvelles conceptions muséographiques », cette quinzaine de contributeurs écrivent des monographies (par exemple « La statuette bamana du Muséum du Havre »), des considérations plus générales, culturelles ou artistiques (par exemple « Réinventer la collecte ethnographique au Musée de l’Homme).

Le lecteur sera intéressé à la fois par le caractère ponctuel de l’évènement d’origine et les perspectives plus générales qu’ouvre l’ouvrage. Peu illustré (étonnant parce que concernant une exposition), à l’appareil critique peu abondant (peu étonnant en raison de la nature de cet ouvrage), il suscite cependant une critique à propos de sa 4ème de couverture.,

Celle-ci justifie les questions que l’on se posait au début de la présente note de lecture. Est-ce parce que la période coloniale est à l’origine de la plupart des collections en Europe ou aux USA ? Est-il rigoureusement exact que les Africains de nos jours accordent une valeur à leur art autre qu’esthétique, à savoir cultuelle, voire religieuse ou « fétichiste » comme l’on disait autrefois ? Heureusement, cette 4ème se termine par une formule plus réaliste : « …et de chercher de nouvelles formes de partenariat entre musées du nord et musées du sud… ».

Ouvrage donc intéressant mais qui suppose de la part du lecteur une certaine familiarité avec ce domaine muséal et anthropologique relatif à l’Afrique.