Hinterlands and commodities : place, space, time and the political economic development of Asia over the long eighteenth century

Recension rédigée par Josette Rivallain


            Les publications de cette collection tournée vers l’Asie cherchent à promouvoir des théories selon lesquelles il existe de nouveaux concepts liés aux notions de l’espace, de la politique et de l’histoire. Les éditeurs poursuivent la recherche de nouvelles idées, de nouveaux débats autour de l’histoire globale et de la place de l’histoire de l’Asie dans le monde.

            Ce livre se situe dans la perspective d’une étude de la colonisation au début de l’Epoque moderne à travers des mécanismes suivis par les ports coloniaux répartis en Afrique orientale, mais surtout en Inde et en Asie ; les activités des régions de l’intérieur connaissaient une tout autre organisation. Cette démarche se suit tout au long du XVIIIe siècle à travers neuf essais, touchant aux relations spatiales et temporelles entre villes, centres commerciaux, ports sous l’angle de l’histoire économique globale. Il s’agit ici de réflexions développées tant par des chercheurs confirmés que débutants, originaires du Japon, de l’Inde, des Etats-Unis qui ont eu recours à des sources documentaires variées, notamment archivistiques hollandaises et asiatiques. A la lumière de cette documentation neuve apparaissent de nouveaux modèles commerciaux en lien d’un côté avec les ports et les routes maritimes, de l’autre, avec les régions éloignées de l’intérieur.

            Dans le premier chapitre, G. B. Souza pose l’importance de la production agricole, l’établissement de circuits économiques et monétaires, au long du XVIIIe siècle. Il s’interroge sur le sens de cette organisation notamment pour le début de ce siècle, s’appuyant sur l’exemple du sucre dans le sud de la Chine, sur ses impacts à l’intérieur et à l’extérieur du pays, et de ses exportations particulièrement à destination du Japon.

            Pour argumenter cette remise en question des connaissances reconnues, notamment sur les rapports existant entre histoire et théorie économique qui veulent que les activités maritimes s’appuient sur les seuls éléments de l’offre et de la demande, Flynn et Lee s’appuient sur les recherches de Pedro Machado concernant le commerce des textiles entre l’ouest de l’Inde et l’est de l’Afrique.

            Dans le troisième chapitre, Nadie démontre à travers l’exemple du Gujarat, l’importance des relations entre ports maritimes et l’intérieur, leur complémentarité dans les activités des populations de ces deux secteurs.

            Dans le quatrième chapitre, G. B. Souza examine la place et le rôle des Arméniens dans le commerce du Bengale au XVIIIe siècle, ainsi que les liens existant entre les populations de cette région avec les ports de Calcutta, Madras, Bombay et Bassora. Il décrit leur autonomie, leur flexibilité bien au-delà des frontières religieuses. A son tour, Mizushima s’intéresse aux relations établies entre les ports coloniaux de Madras et de Pondichéry et l’intérieur des terres au début de l’Epoque moderne. Il souligne le rôle important qu’elles jouèrent, provoquant de lourds déséquilibres entre les réseaux locaux et les règles de l’économie coloniale animées par d’autres critères.

            Atsushi Ota explicite le déclin de l’agriculture de l’ouest de Java tout au long du XVIIIe siècle face au développement de la culture privilégiée du poivrepar la Dutch East India Company. Les habitants durent de plus en plus acheter au marché leurs céréales et même se déplacer. Certains furent attirés par les plantations de sucre situées à l’est du pays, là où les chinois étaient plus ou moins impliqués dans le commerce de l’opium. De nouveaux liens s’établirent entre et avec les populations de migrants, rompant avec l’équilibre antérieurement construit entre commerce et état.

            Shimada étudie le commerce de l’étain produit au cours du XVIIIe siècle dans le sud-est asiatique, le passage d’une production locale à une autre à l’échelle mondiale, notamment afin de répondre à la demande de la Chine.

            Enfin, Murakami  conclut que la très large expansion que connut le commerce au cours de ce siècle a eu un impact très fort sur le développement de la Chine intérieure et est en grande part la cause de la grave crise économique et sociale que le pays connu au XIXe siècle.