Le patrimoine artistique français de l'Algérie : les oeuvres du Musée national des beaux-arts d'Alger, de la constitution à la restitution, 1857-1970

Recension rédigée par Stéphane Richemond


 

            Nous connaissons bien Élisabeth Cazenave, grande spécialiste de l’art en Algérie, pour être déjà l’auteur de plus d’une dizaine d’ouvrages sur les artistes français de l’Algérie. Rappelons ses deux plus importantes contributions sur ce sujet : La Villa Abd-el-Tif, un
demi-siècle de vie artistique en Algérie, 1907-1962
(éditions Abd-el-Tif 1998), qui fut l’objet de sa thèse consacrée à la fameuse villa Médicis algéroise (qui accueillit 87 artistes métropolitains entre 1907 et 1961) et Les Artistes de l’Algérie : dictionnaire des peintres, sculpteurs, graveurs, 1830-1962 (éditions Bernard Giovanangeli et Association Abd-el-Tif, 2001), qui sont des incontournables pour tous ceux qui s’intéressent à l’art en Algérie.
Jean-Christian Serna a concouru à cet ouvrage en apportant son éclairage sur les aspects juridiques de la restitution des œuvres d’art à l’Algérie.

            À partir de 1956, la question de la protection des œuvres d’art du Musée national des beaux-arts d’Alger (MNBAA) commença à se poser sérieusement, mais on s’inquiétait aussi des répercussions qu’une telle décision pouvait avoir en Algérie. Il n’était plus urgent d’attendre en 1962 lorsque Christian Fouchet, haut-commissaire de la République en Algérie, prit la décision de transférer 300 tableaux et dessins conservés par le MNBAA. 304 œuvres exactement (112 dessins anciens, 84 dessins modernes, 156 peintures) qui furent reçues et entreposées dans les réserves du musée du Louvre en mai 1962. Mais dès l’Indépendance, l’Algérie demanda la restitution de ces œuvres au nom des accords d’Évian. La polémique enfla et des pourparlers tendus ne prirent fin qu’avec « la restitution » des œuvres qui eut lieu en 1970.

            Le travail d’Élisabeth Cazenave ne fut possible que grâce au versement, tant attendu par l’auteur, des archives de la Direction des musées de France dans le domaine public. L’auteur aborde d’abord l’histoire de la constitution des collections des musées d’Algérie. Les œuvres ont des statuts divers qui contribueront à rendre les négociations compliquées. Certaines furent achetées par les musées algériens sur leur budget propre, mais d’autres furent de simples dépôts de l’Etat français, de musées de statuts divers, de collectionneurs privés, parfois métropolitains. Ces œuvres pouvaient être tant en France, qu’en Algérie.

            Élisabeth Cazenave établit la liste des œuvres acquises par le MNBAA, ainsi que la liste des œuvres restituées. Elle relate cette difficile négociation, une page de l’histoire des relations franco-algériennes sur lesquelles un éclairage inédit se trouve ainsi jeté. Tous ces points ici abordés constituent la richesse d’un ouvrage qui apporte enfin des réponses aux nombreuses questions posées depuis la « restitution ».

            Nous ne pouvons que nous féliciter de l’importante contribution d’Élisabeth Cazenave à l’art français en Algérie.