Des damné(e)s de l'histoire : les arts visuels face à la guerre d'Algérie

Recension rédigée par Jean Nemo


L’auteure a soutenu une thèse en 2014 intitulée « La France face à son Histoire, les artistes plasticiens et la guerre d’Algérie, de 1954 à nos jours ». Elle est donc docteure en histoire de l’art.

L’ouvrage proposé pour le prix d’encouragement à la recherche, au premier tour de la commission des prix 2019 s’inspire étroitement de la recherche menée à partir de 2007 pour l’élaboration de cette thèse. Mais ce n’est pas exactement ici sa version « grand public ».

Le parcours de l’auteure est essentiellement consacré aux enjeux mémoriaux à propos de la décolonisation, notamment avec l’Algérie. Elle fut boursière du gouvernement français à l’IRMC de Tunis de 2009 à 2011. Elle fut chercheure post doctorante au Centre allemand d’histoire de l’art de Paris (2016-2017), elle appartient actuellement au centre Norbert Elias à Marseille, où elle bénéficie d’une bourse post doctorale allemande.

Elle a publié d’assez nombreux articles dans des revues à comité de lecture, dont plusieurs consacrés à Frantz Fanon.

L’ouvrage proposé à la commission des prix en premier tour est préfacé par Daho Djerbal, universitaire d’Alger et directeur de la revue NAQD (Revue d’études et de critique sociale, algérienne). Lequel la conclut ainsi : « La lecture de l’ouvrage marquera certainement par sa démarche critique et richement documentée, l’historiographie contemporaine de l’art en temps de guerre coloniale ».

L’ouvrage lui-même, outre son introduction, comprend deux grands chapitres, richement illustrés en fin du livre.

Le premier traite de la période 1954-1962, il est intitulé « les artistes face aux évènements : contester une guerre sans nom ». Il traite de la censure et de l’autocensure, de « la guerre invisible » et des transgressions à ou contournements de cette invisibilité. Il se termine en expliquant « l’indépendance comme source d’une identité artistique algérienne ».

Le second est consacré aux « résurgences de la mémoire de la guerre d’Algérie dans la production artistique postcoloniale ». Il traite entre autres de la gestation du musée d’Art moderne d’Alger, d’artistes en devenir, tant du côté algérien que français. Pour le lecteur d’aujourd’hui, ayant peut-être oublié tout ou partie les débats de l’époque, ce chapitre les lui rappellera. En ce qui concerne les arts, ils furent animés, voire agressifs, jusqu’à l’apaisement des esprits, encore tout récent.

Dans sa conclusion et dans son épilogue, l’auteure rappelle les tentatives des années 2005 pour faire reconnaître « les aspects positifs de la colonisation ». Le transfert vers « l’objectivation », d’après l’auteure, pourrait « aussi s’opérer par le biais des œuvres d’art ». Car bien souvent, le recours aux archives et leur exploitation sans passion peuvent être utilement appuyées par les œuvres d’art.

Cet ouvrage et son auteure abordent un aspect inhabituel de la recherche historique. Il prête à bien des commentaires que l’on n’abordera pas ici. Mais il marque une étape significative dans le travail de mémoire, étape trop souvent négligée…

Le parcours de l’auteure, les étapes de sa jeune carrière et les caractéristiques ci-dessus esquissées de son ouvrage la rendent éligible au prix d’encouragement à la recherche.

Il conviendrait, éventuellement par contacts personnels avec le rédacteur de la présente note de lecture, que le président de la 5ème section invite les membres de ladite à donner leur avis sur la proposition ci-dessus.