La tentation de l'Afrique : néo-gritude, afropolis, mondialité

Recension rédigée par Jean Martin


Frédéric Treffel est professeur associé en sciences politiques et en sciences de la communication à l’université de Cergy-Pontoise. Il est également chercheur au sein du laboratoire « Lexiques, textes, discours, dictionnaires », fondé par Bernard Mouralis dans la même université. Il a enseigné dans plusieurs universités africaines (notamment Cheikh Anta Diop à Dakar) et a été conseiller du Président du Conseil économique et social (français). Il a également été directeur des études et de la documentation du Haut Conseil à l’Intégration et délégué général de l’observatoire national interministériel de l’éducation à l’environnement pour un développement durable. Il s’est par ailleurs fait connaître pour ses recherches sur l’islam noir et les confréries sénégalaises et est président du Club Valmy.

Après Hegel et quelques autres, M. Treffel nous rappelle que l’Afrique a été longtemps la grande absente de l’histoire dont, faute d’écriture, elle n’était pas et ne pouvait être une actrice à part entière. Nuit et sommeil de l’humanité disait le maître d’Iéna.

De la lecture de ce livre étrange, préfacé par le lexicologue Jean Pruvost, écrit dans un langage ésotérique où abondent le jargon philosophique et les néologismes qui n’en facilitent pas la compréhension, le lecteur peut retirer une question de fond : La négritude peut-elle être considérée comme un aspect universel de la pensée humaine ? On trouve pp.39-40 une intéressante analyse de l’œuvre du RP. Placide Tempels La philosophie bantoue qui fut saluée en son temps (1945) par des esprits très distingués qui offrirent leur contribution à un numéro spécial de Présence Africaine (1949). Il nous semble que certaines considérations de Tempels sur la force vitale ou l’élan vital doivent plus à Bergson dont le nom était alors sur toutes les lèvres, (dans ce naufrage permanent qu’est l’histoire de la philosophie) qu’à la pensée africaine proprement dite.

Il est surprenant d’apprendre (p.50) que pour Césaire, les « Chants de Maldoror » sont un grand discours anticapitaliste. Il est certes permis de rendre à Édouard Glissant un hommage mérité (p.190) de même qu’à Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant, mais peut-on raisonnablement saluer dans cet auteur un des plus grands poètes français du XX ème siècle ? Quid de Valéry, Aragon, Saint John Perse, Senghor ?

Frédéric Treffel nous dit être en quête d’une nouvelle universalité concrète (pensée sans doute profonde mais malheureusement hermétique) et nous met en garde contre une conception trop optimiste et trop occidentale de la raison et du progrès. Il existerait donc des conceptions occidentales de la raison ? Une relecture plus attentive de Descartes lui rappellerait qu’il n’existe que des raisonnements justes et des raisonnements faux.

Nous sommes au niveau de la doxa de M. Frédéric Treffel qui est certes un homme cultivé. Mais en quoi l’Afrique est-elle une tentation ? Le plan n’apparaît pas toujours avec une clarté suffisante mais l’ouvrage est doté d’un index fort utile.