D’un autre monde

Auteur François de Grossouvre
Editeur Stock
Date 2023
Pages 169
Sujets Essai
Afrique
Cote
Recension rédigée par Yves Boulvert


Dans cet ouvrage, l’auteur explique à ses lecteurs pourquoi il est passé « dans un autre monde ». Né en 1981, il est le petit-fils de son homonyme, François de Grossouvre, ami et conseiller spécial du Président François Mitterrand dont il était directeur des chasses. Le 7 avril 1994, son grand-père est retrouvé mort, le révolver à la main, dans son bureau à l’Élysée. Suicide ou assassinat ? « Les politiques nageaient dans un affairisme glauque et violent, les scandales politico-financiers étaient étouffés … les assassinats et les morts suspectes se succédaient … ». « Dans ma tête d’enfant, je ne comprenais pas ce qu’il se passait ». « Á 18 ans, j’ai abandonné mes études pour partir en Afrique ».

Á partir de 1980, une vague de braconnages fait disparaître d’Afrique Centrale d’immenses troupeaux d’éléphants, ainsi que des espèces rares, tel le rhinocéros. Gérard, un ami de son grand-père, l’accueille comme apprenti-guide dans une réserve isolée de Tanzanie où il fait l’apprentissage … d’un continent et d’une vie nouvelle. « Il n’y avait pas d’eau courante au village ». Il croit tomber sur un grand lac où personne n’était jamais allé ! Il découvre surtout les secrets de la nature, un privilège qui était avant tout une vocation.

François de Grossouvre rencontre Matthieu Laboureur, le dernier conservateur du parc national du Manovo - Gounda Saint-Floris en Centrafrique, passionné d’oiseaux, connaisseur aussi des plantes et de leurs vertus médicinales. A la fin des années 80, Matthieu emmène François de Grossouvre à la Gounda où il lutte pour protéger les éléphants de cette réserve, risquant sa vie en se battant contre les braconniers les plus déterminés … « C’était des colonnes de centaines de Soudanais, à cheval et à dos de chameau (des dromadaires), armés d’AK 47, réduisant en esclavage de jeunes hommes habitués à vivre en brousse …  En Centrafrique, tout était plus difficile … Il fallait pallier le manque de ressources par l’inventivité … »

Parmi les clients des sociétés de safari, on trouvait des personnes mues par des motivations diverses. Certains ne s’intéressaient qu’aux trophées records, Victoria voulait chasser le léopard, pour se faire un manteau, mais pour cela, il fallait plusieurs peaux.  Dans les années 50, les élégantes rêvaient encore de peau de panthère ; aujourd’hui l’appellation française officielle pour Panthera pardus semble avoir disparu.

 En 2016, à 35 ans, la société tanzanienne ayant dû fermer, François de Grossouvre accepte la proposition d’aller construire un camp à la frontière Congo-Cameroun (bassin de la Ngoko-Sangha), ce qui lui permettra de découvrir la forêt dense humide congolaise et les pygmées Aka ou Mbaka, « l’un des derniers peuples au monde, capable de vivre exclusivement des ressources de la nature, sans agriculture ni élevage », « victimes de racisme et de mépris ».  « Là encore, règne le braconnage ainsi que les conflits ethniques entre Pygmées et Bantous » … « le braconnage, la corruption, l’ambiance eurent raison de ma motivation ».

Il rentre en Espagne où il a acquis une petite maison. En Afrique, l’heure n’est plus à l’état d’esprit du milieu du XXe siècle où au plus quelques passionnés de nature et de chasse avec trophées croyaient faire la loi. « Le choix radical que j’avais fait à 18 ans, synonyme d’apprentissage et de rencontres, le privilège de vivre en homme libre, celui d’avoir choisi mes maîtres … était abattu par des règles nouvelles, celles d’une société prête à me faire payer l’addition de ces années de liberté ».

 Les armes sont aujourd’hui partout avec braconniers ou irréguliers, miliciens Wagner entre autres. Passionné par l’éthologie des espèces animales, François de Grossouvre a enfin trouvé la paix en Patagonie Argentine où il travaille comme consultant et fauconnier.