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Jeunesses arabes : du Maroc au Yémen : loisirs, cultures et politiques

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Recension rédigée par Romain H. Rainero


           Après les clameurs, les espoirs et maintes incertitudes, voici que l’on parle, presque deux ans après son explosion, des effets et des espoirs de ce « printemps arabe » qui a été à la une de tous les périodiques. Mais, voulant en examiner les réalités plus récentes, qu’en reste-t-il dans la réalité arabe ? À cette question, l’ouvrage collectif que nous présentons paraît répondre au vieil adage de certains arabisants de l’après-guerre qui soulignaient la multiplicité, voire l’incohérence d’un monde que la banalité occidentale des temps jadis appelait tout simplement le « monde arabe ». Désormais, le pluriel devrait s’imposer car « les mondes arabes » sont multiples et contradictoires. La valeur et la qualité des observations de François Burgat, directeur du prestigieux IREMAN d’Aix-en-Provence, sur les aspects évoqués par les 38 chapitres rédigés par de jeunes chercheurs de 18 pays, nous confirment que l’idée d’une aire arabe « monolithique » doit être désormais abandonnée en faveur d’une vision qui confirme la variété et les contradictions qui existent aujourd’hui parmi les arabes du Nord, du Sud, de l’Est et de l’Ouest, et entre une vingtaine d’États aux caractères profondément différents.

Il s’agissait d’une opération-vérité que l’engagement des deux rédacteurs, Laurent Bonnefoy et Myriam Catusse, a su mener à bien, en confirmant que la situation de la jeunesse, dans les 18 pays concernés par la recherche, est variable et, donc, nous montre la difficulté de vouloir appréhender d’une manière homogène une condition qui n’a rien d’homogène. Les aspirations culturelles, politiques et sociales examinées sous le couvert de « loisirs » sont extrêmement intéressantes à découvrir et elles nous indiquent que, même l’élément ethnique « arabe », souvent considéré comme déterminant, ne l’est plus d’une manière absolue. La considération de la préfaceadhère à notre manière de voir cet univers peu connu dans ses conditions actuelles : « Que disent au monde les « jeunesses arabes » d’aujourd’hui ? Rien, ou du moins pas grand-chose, de ce qu’on veut trop souvent leur faire dire, ou de ce que l’on croit leur avoir entendu dire ! » Et cette triste constatation est confirmée par la lecture de ces 38 témoignages, qui ont évidemment la valeur d’être des documents intéressants quant à la connaissance, sur le terrain, des jeunesses grandissantes à l’ombre de l’islam arabe.

Donc ce livre est important pour ce qu’il nous raconte sur un « univers » tout à découvrir qui est bien loin des hypothèses du passé et qui s’éloigne d’une banalité trop souvent répétée dans nos journaux, en faveur d’une vision illustrée par ces jeunes. Dans les quatre sections de l’ouvrage le contraste nous apparaît clairement ; les thèmes sont fascinants : Vivre son époque, Enraciner l’avenir,Se construire soi-même et Prendre la parole, voilà, l’horizon de la recherche. Et du Maroc au Yémen, de l’Algérie à la Syrie en passant par tous les pays, les questions qui se posent sont multiples et variées et tout porte à conclure que le temps des stéréotypes est révolu, à tout jamais. Depuis 2011, le reste du monde s’interroge sur ce « continent arabe », sans en comprendre grand-chose. La réponse est certainement complexe et elle s’inscrit, tous les jours, dans les actualités. Mais une lecture telle que nous l’offre cette recherche-étude collective peut être les prémices d’une compréhension plus valable.

 


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